mardi 9 septembre 2014

9 : Lui paysan, moi lycéen, et ensuite ?




Au matin, après m'être fourvoyé une seconde fois, je finis par retrouver le sentier balisé. Continuant mon ascension, je découvre au loin, sous un angle inhabituel, le monastère de Tatev dominant son ermitage. Ma photo n'est certainement pas unique, mais je n'ai trouvé nulle part le même point de vue.


Aux abords du village, le plateau se prête à une activité agricole qui couvre le sol en damier. Je vais accompagner Amalia par les ruelles, sur le chemin de l'église où elle va pleurer la mort de son fils. Est-il, lui aussi, victime de la guerre pour le Qarabagh ?


A l'entrée du monastère, quelques étals offrent des en-cas pour les pèlerins affamés, des souvenirs pour les touristes sentimentaux. Je m'offre alors un jingalov hat aux sept herbes pour 500 drams (1 euro). Il me rappelle Knarik et Bruno.
Ainsi ce sont les encas qui sont des souvenirs, ce sont les touristes qui sont des pèlerins, et je ne sais plus qui je suis.
L'une des marchandes ne doit pas le savoir non plus car elle regrette que je sois marié... et déclenche l'hilarité.


Le monastère de Tatev est riche de ses bâtiments conventuels, et de sa situation en surplomb des gorges du Vorotan. Le haut tambour et le narthex de la cathédrale St Pierre et St Paul, fondée en 900, en font un édifice imposant et prestigieux. Un panneau précise que l'éducation de paysan (sic) du fondateur ne l'empêcha pas de devenir évêque. Je réfléchis à une comparaison et réalise que mon éducation dans un lycée de la République ne m'empêche pas de courir les monastères. Et pourtant, je n'étais pas un "enfant de chœur". 



Dans l'enceinte du monastère, je rencontre un couple français attentif qui me propose d'envoyer un message à Sylvie, depuis leur hôtel, pour la rassurer avec ma photo : je suis sur pieds, j'ai bonne mine, je peux tenir une conversation simple et je ne prends aucun risque. Arménie, la villégiature !
Cessons de rire, je suis très heureux de cette humanité.


Au milieu de la journée, la chaleur est écrasante, et les fontaines comme les torrents sont plus ou moins taris. Par précaution, je dois porter trois litres d'eau qui alourdissent d'autant mon sac. Tout filet d'eau est bon pour alimenter mes gourdes. En voici un que je n'ai pas négligé malgré son aspect, et qui relève d'une technique sûre : la bouteille verte qui sert de déversoir, coincée sous sa pierre, est enfouie dans la vase qui filtre. Une aubaine !






Dans le village d'Aghvani, je cherche un "monument" qui s'avèrera être une ruine presque disparue. Il a le mérite de nécessiter une enquête. Mes questions vont servir d'alibi pour héler une famille qui dîne sur sa terrasse, et me voilà invité à partager un grand plat de pommes de terre aux oignons, bien rissolées. C'est une famille privilégiée qui possède une vaste maison et une voiture moderne.
Dans le village suivant, Tandzaver, la grand-mère n'est pas privilégiée mais elle m'offre avec le sourire cinq prunes qu'elle préparait pour des conserves en bocaux.



Ma tente, mon ermitage, sous son pommier.
Toute la nuit, ce sera chute de pommes sur chute de pommes, tambourinant sur le sol, mais pas une seule sur la tente ou alors dans l'inconscience...






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