vendredi 26 septembre 2014

26 : La Tragédie et l'Espoir


LA TRAGÉDIE : LE GÉNOCIDE 
"La Grande Catastrophe"

Le génocide est défini comme l'extermination physique, systématique, intentionnelle et programmée d'un peuple en raison de ses origines ethniques, religieuses ou sociales.

Le mont Ararat vu depuis le Mémorial du Génocide.

Séparé de Yérévan par les gorges du Hrazdan, le Mémorial du Génocide répond au mont, le "Mémorial du Déluge". L'un et l'autre sont ancrés dans le cœur des arméniens, omniprésents et éternels. Une œuvre d'Alexandre Spendarian, père de la musique classique arménienne, sacralise le lieu.
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Le premier génocide du XX ème siècle a fait plus d'un million deux cent mille morts : les deux tiers de la population arménienne dans l'Empire Ottoman. Le tiers rescapé a fui en Iran, au Caucase, dans les Balkans et dans les provinces arabes. Le génocide avait été précédé, 20 ans auparavant, de massacres à grande échelle ordonnés par le sultan Abdülhamid II responsable de 200.000 morts. Sous le règne de son successeur, le sultan Mehmed V, les massacres d'Adana feront 30.000 morts, puis le triumvirat des "Jeunes Turcs" profitera de la Première Guerre Mondiale pour mettre en œuvre sa "solution finale".

L'organisation matérielle du génocide suit un plan établi qui ne laisse aucun doute sur les intentions des "Jeunes Turcs", ni sur l'ampleur du projet : recrutement de tous les délinquants élargis des prisons de l'Empire pour les basses œuvres, élimination initiale des élites stambouliotes, exécution sans délai des hommes valides, déportation planifiée des femmes, enfants et vieillards vers les déserts syriens, camps de regroupements échelonnés... sans parler des spoliations, exactions, tortures, viols, affamement...  Le gouvernement turc aura même l'audace de réclamer les primes d'assurance-vie. 
Le mobile avancé par les autorités sera la trahison de tout un peuple, femmes et enfants compris, sous prétexte que les arméniens du Caucase sont enrôlés dans l'armée russe, adversaire de la Turquie lors de la Guerre. La population arménienne est coupable de vivre séparée en deux sur une frontière entre belligérants.


Enver "Pacha" est ministre de la guerre de l'Empire ottoman. Germanophile après ses études en Allemagne, il engage son pays aux côtés des Puissances Centrales sans en avertir le sultan auquel il a retiré tout pouvoir, et crée l'Organisation Spéciale qui planifiera le génocide. Vaincu à Sarikamish par l'armée russe dans des conditions dramatiques, il en reporte la faute sur les arméniens.

En 1919-1920, les tribunaux turcs eux-mêmes condamneront à mort par contumace les dirigeants "Jeunes Turcs", Talaat, Enver et Djémal, responsables de la défaite et des massacres.

Ensuite, Mustapha Kémal prendra le pouvoir et la nouvelle république kémaliste parachèvera le nettoyage ethnique étendu aux grecs et aux assyro-chaldéens, dans une impunité jouant des rivalités est-ouest et des intérêts commerciaux.
Actuellement le négationnisme des gouvernements turcs qui s'obstinent dans un déni sans pudeur ne fait certainement pas honneur à ses tenants, mais il est courageusement contrebalancé par nombre d'intellectuels et artistes turcs qui militent pour la reconnaissance du génocide. Le 23 octobre 2014 des journalistes turcs sont ainsi reçus au Musée du Génocide.
Au jour où j'écris, la question se pose de savoir si "The Cut", le film de Fatih Akin sur le génocide arménien va vraiment sortir sur les écrans turcs. Qu'une date de sortie soit fixée est en soi un grand progrès.


La flèche de 44 mètres est en cours de restauration. 
Le musée lui-même est fermé pour travaux.

 La flamme éternelle est entourée de douze stèles de granit.
Le Mémorial est intemporel et ancré.
Le Mémorial est mon dernier monastère.


 

Voici le pin que François Hollande a planté le 12 mai 2014. Les présidents français ont contribué à peupler la forêt du Mémorial riche du passage de nombreux diplomates et dirigeants du monde entier. Dès 1965 l'Uruguay fut le premier pays à reconnaître le génocide, suivi de Chypre, la France le faisant en 2001. Trois pays européens vont plus loin en pénalisant le négationnisme : la Suisse, la Slovaquie, et la Grèce en 2014.

Carte des pays qui ont reconnu le génocide arménien
 d'une façon ou d'une autre
(loi ou résolution parlementaire).


L'ESPOIR : L'ENFANCE

Au fond des gorges que je traverse pour retourner en ville coule le Hrazdan dans un écrin de verdure.
Sa fraîcheur attire les flâneurs et les joueurs de cartes. 
Sur sa rive orientale un petit train, sa gare et sa voie ferrée amusent les enfants des écoles.
En franchissant la rivière sur la passerelle, avec leur insouciance, me revient l'espoir.



 








Comme les joueurs de cartes,
les joueurs de trictrac, eux aussi, s'installent où bon leur semble.




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